Lutter contre les violences sexistes

Violences interpersonnelles Prévenir et éduquer Evaluer et piloter
S'emparer de la question du genre

Témoignage

Théo est un élève scolarisé en terminale bac pro. En février, il va voir le chef d’établissement pour l’informer qu’il se considère comme une femme et qu’il a donc demandé (en mairie) un changement de prénom, "Laura", qu’il souhaiterait voir figurer sur les documents officiels, notamment sur son diplôme du bac.
La transidentité de Théo n’était absolument pas connue au lycée, c’était un élève plutôt discret, assez solitaire, ses choix vestimentaires, son comportement ne laissaient rien paraître de sa situation.
image pexelscottonbrostudio6217796.jpg (2.3MB)
La professeure principale et la CPE mises au courant, avec l’accord de l’élève, proposent de parler de ce « changement » à la classe et à l’équipe pédagogique, afin notamment de lui permettre d’être appelée par son prénom féminin et d’être correctement genrée. Après quelques hésitations, Laura accepte. Une projection-débat d’un film relatant l’histoire vraie d’un jeune en transition est organisée, en présence de la psychologue qui suit Laura et au cours du débat, Laura révèle sa situation.
L’accueil par les élèves de la classe est très positif, soutenant. Laura est soulagée. Par ailleurs l’équipe pédagogique est informée, il lui est demandé d’appeler Laura par son nouveau prénom et d’être vigilante sur l’ambiance de classe .
2 mois plus tard Laura se rend chez la CPE, qui l’a convoquée suite à quelques absences répétées, et explique qu’un de ses enseignants semble mettre un point d’honneur à continuer à l’appeler Théo, malgré les rappels répétés des élèves de la classe qui le reprennent systématiquement. Par ailleurs, à l’internat, (Laura est logée dans l’internat garçons comme elle l’était depuis le début de l’année) des injures homophobes et transphobes ont été proférées à de nombreuses reprises par des jeunes d’une autre classe que la sienne, des dessins obscènes ont été glissés sous sa porte.

L'essentiel à savoir

Fichier audio : Télécharger le fichier transgenre.mp3

image vignette.png (17.1kB)

Lutter contre les violences sexistes


Comment l’école doit-elle, peut-elle accueillir les questions posées par l’identité de genre, incarnées par des élèves en transition qui viennent interroger les règles, codes, espaces, habitudes langagières… de l’institution et des adultes qui y travaillent ? Les questions d’identité de genre concernent-elles bien l’école ? Comment réconcilier les réalités d’un(e) élève en transition avec les lieux souvent genrés de l’institution scolaire ?

Les questions transgenre constituent un sujet globalement méconnu qui, de ce fait, peut susciter une réaction de malaise ou d’incapacité à apporter des réponses, voire une réaction de crainte de mal faire. Pour autant, la mise en avant de cette question dans notre société, via un relais médiatique et une mobilisation des associations trans, a accompagné une multiplication des demandes des jeunes concernés comme évoqué dans la situation de Théo.
Si la question de l’adoption d’un nouveau prénom est dans la plupart des cas une des premières formulées par le/la jeune trans, un certain nombre d’adaptations très concrètes du fonctionnement de l’institution sont souvent demandées dès lors que la personne est acceptée dans son identité. C’est alors un dialogue constant et une mise à plat des possibilités d’aménagement, au niveau des locaux notamment (vestiaires, internats…) qui permettent d’avancer au mieux avec l’élève concerné(e).
Des principes fondamentaux sont à respecter dans l’accompagnement d’un jeune qui se tourne vers un adulte de l’établissement pour lui signifier sa transidentité, au premier rang desquels le respect de la confidentialité. Les informations sur la situation ne peuvent être communiquées qu’avec l’accord de la personne concernée qui cheminera, à son rythme, vers un éventuel élargissement du nombre de personnes mises au courant de sa situation.

Il est néanmoins souvent important et facilitant que les jeunes de la classe aient une connaissance réelle de la situation plutôt que de laisser place à des rumeurs ou interprétations, terreau d’actes malveillants ou propices au harcèlement qui est sous le coup des lois des 27 janvier 2014 et 2017. La démarche « d’explication » est à co-construire avec le/la jeune concerné(e)si il le souhaite, en utilisant par exemple, le prétexte d’une projection débat ou grâce à l’intervention d’une association.

On sait que les jeunes trans sont davantage victimes de harcèlement et de violence que les autres. Cela nécessite une vigilance particulière. Mais dans ce type de situation, un travail sur un projet éducatif axé sur le climat scolaire, favorisant la prévention de toute forme de violence et discrimination, est un élément déterminant de l’acceptation de toutes les formes de « différence ».

Enfin, la cohérence de l’équipe éducative autour de l’accompagnement du/de la jeune concerné(e) est un gage de son épanouissement et de sa réussite scolaire. La circulaire de l'Education Nationale du 29 septembre 2021 « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l'identité de genre en milieu scolaire » rappelle que la direction de l’établissement « joue un rôle central en matière d'information des personnels (la gestion de l'information implique également, dans certaines situations, le respect de la confidentialité et de la vie privée) et de coordination de l'équipe éducative. Il lui revient de rappeler aux personnels leur responsabilité en termes d'accompagnement et de protection de ces élèves ».

Ressources

Ressources réglementaires

La loi du 6 aout 2012 relative au harcèlement sexuel et à la transphobie pénalise les actes de transphobie en raison de l'identité sexuelle.

La loi du 27 janvier 2014 punit les propos injurieux à caractère transphobe.

La loi du 27 janvier 2017 article 33 aggrave les peines applicables aux délits faisant infraction à l'identité de genre réelle ou supposée.

  • Ressources éducatives
Lutte contre la haine anti LGBT+ Prévention et mobilisation dans l'enseignement agricole

Les élèves de l’enseignement agricole s’engagent dans la lutte contre la haine anti LGBT Vidéo et Guide d'accompagnement

Fiches repères pour l'accueil des jeunes trans dans les établissements de l'EA

Associations ressources LGBTQI+

Circulaire du 29-9-2021 MENJS - DGESCO : Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l'identité de genre en milieu scolaire

-Fiche droits intersexes DILCRAH

INPES: outil d'intervention contre l'homophobie: Jeunes et homo sous le regard des autres

Agir à l'École contre les LGBTphobies : leviers et ressources utiles

Bibliographie

Richard, G. (2019). Hétéro, l'école ? Plaidoyer pour une éducation antioppressive à la sexualité. Ed. Remue ménage-collection ,collection Études culturelles.
Castro, C. & Zuttion, Q. (2018). Appelez-moi Nathan. Payot Graphic.
Williamson, L. (2017). Normal(e). Hachette.
Hefez, S. (2022). Transitions. Réinventer le genre. Ed. Calmann-Levy.

Filmographie :
Petite Fille de Sebastien Lifshitz.
Girl de Lukas Dhont.
Lola vers la mer de Laurent Micheli.
Tom boy de Céline Sciamma.

FAQ

  • De quelle marge de manœuvre bénéficie l’école pour accompagner les élèves dont les parents ou les responsables légaux n’appuient pas la transition ?
Si l'élève fait seul la démarche d'aborder la question de son identité de genre auprès d'un personnel de l'établissement, une communication avec les représentants légaux ne doit se faire qu'avec l'accord explicite de l'élève. Le respect du principe de confidentialité est en effet capital : dans certains cas, une divulgation non souhaitée de la transidentité du jeune peut l'exposer à un sérieux risque de rejet ou de violence.
Si le soutien familial revêt une importance capitale pour le bien-être des jeunes trans, il peut être difficile à obtenir. Dans les meilleurs cas, il implique un processus d’adaptation, voire de deuil, plus ou moins long.
Si l'élève en fait la demande, l'équipe éducative a tout intérêt à créer les conditions d'un dialogue constructif, voire d'une médiation, avec les représentants légaux permettant de rechercher le consensus et de favoriser une meilleure prise en compte de la situation du mineur.
Rappelons que dans les cas où le mineur apparaît en situation de danger dans son environnement familial ou de vie, il peut être décidé de rédiger et transmettre une information préoccupante à la cellule départementale de recueil des informations préoccupantes (Crip) ou de faire un signalement judiciaire auprès du parquet des mineurs.

  • Peut-on utiliser dans l’établissement un autre prénom que celui figurant sur les listes "officielles ?
Dans le cas le plus fréquent, quand l'état civil n'a pas été modifié, si la demande est faite avec l'accord des deux parents de l'élève mineur [5], il s'agit alors de veiller à ce que le prénom choisi soit utilisé par l'ensemble des membres de la communauté éducative, le respect de l'identité de genre d'un élève ne devant pas être laissé à la libre appréciation des adultes et des autres élèves .
De la même façon, pour accompagner ce changement, l'établissement scolaire substitue le prénom d'usage, de manière cohérente et simultanée, dans tous les documents qui relèvent de l'organisation interne (listes d'appel, carte de cantine, carte de bibliothèque, etc.) ainsi que dans les espaces numériques (ENT, etc.). En revanche, la prise en compte du contrôle continu pour les épreuves de certains diplômes nationaux implique que seul le prénom inscrit à l'état civil soit pris en compte dans les systèmes d'information organisant le suivi de notation des élèves.
En tout état de cause, l'établissement, bien que soucieux de l'accompagnement de l'élève, ne peut opérer un tel aménagement sans l'accord des représentants légaux. L'exercice de l'autorité parentale, qui recouvre un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant, ne saurait être remis en cause.

  • N'y a t-il pas un" phénomène de mode" chez les jeunes aujourd'hui qui se disent trans alors que cela n'est peut-être qu'une étape dans la construction de leur personnalité ?
Il n’y a ni épidémie ni mode. Les jeunes ne se réveillent pas un matin en décidant qu’il serait peut-être bien d’être trans.
Des travaux néo-zélandais portant sur des échantillons représentatifs aléatoires de jeunes du secondaire (cisgenres et transgenres) confirment que près de la moitié des jeunes trans rapportent s’être senti·e·s « différent.es » sur le plan du genre (à défaut d’être en mesure de mettre des mots sur cette réalité) bien avant l’adolescence : 27,3 % avant l’âge de 8 ans, 17,9 % entre 8 et 11 ans et 54,8 % à 12 ans ou plus.
Il n'est de toutes façons pas du ressort de l'établissement scolaire de valider u pas le questionnement sur son identité de genre d'une personne, la mission éducative devant se concentrer sur la mise en œuvre.

  • La manière de s'habiller d'un élève trans, en contradiction avec son sexe biologique et son apparence physique doit-elle être acceptée?
Outre l'utilisation du prénom et des pronoms d'usage, le respect des choix liés à l'habillement et à l'apparence est également un aspect important de la reconnaissance de l'identité de genre de ces jeunes. Il appartient aux personnels de veiller à ce que l'expression de genre des élèves ne soit pas remise en cause ou moquée, notamment de la part des autres élèves et des personnels. Les mesures contre le harcèlement et le cyberharcèlement du programme pHARe (Programme de lutte contre le harcèlement à l'école) s'appliquent particulièrement à ce type de situations.

Il convient également de s'assurer que les règles de vie scolaire, en particulier celles relatives aux tenues vestimentaires, ne font pas l'objet de consignes différenciées selon le genre. Ainsi, les vêtements et accessoires autorisés et interdits le sont pour tous les élèves sans distinction, notamment lorsque ces interdictions sont justifiées par des impératifs de sécurité. Il en va de même pour le port du maquillage et des bijoux - y compris dans les filières professionnelles et durant les périodes de formation en milieu professionnel.