Agir contre les violences verbales et la banalisation de l'insulte
Violences interpersonnelles
Prévenir et éduquer
Agir et gérer une crise
Agir contre les violences verbales et la banalisation de l'insulte
Témoignage
- La salle des professeurs du Lycée agricole de L. est très animée ce matin. Marie et Isabelle, respectivement enseignantes de français et mathématiques en 1ere professionnelle Laboratoire Contrôle Qualité ont fait part de leur « ras le bol » d’entendre dans les couloirs et parfois même en cours, les élèves s’interpeller par des mots injurieux. Les « salut connasse ! » et « t’as raison gros pédé ! » sont banalisés, utilisés très fréquemment et semblent faire partie du langage courant sans aucune connotation insultante et dégradante aux yeux des élèves. » En tous cas, c’est ce qu’ils m’ont répondu quand j’ai commencé mon cours ce matin en leur signifiant que j’étais choquée par cette manière de s’interpeller » affirme Marie. Léa est intervenue et m’a dit « ...tout le monde s’insulte maintenant, ça c'est devenu notre langage, c’est le nouveau langage madame …! »
L'essentiel à savoir
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Analyse de la situation et pistes d'actions
On peut aujourd’hui affirmer que la problématique de l’évolution du langage utilisé par les élèves entre eux questionne l’ensemble des équipes éducatives.Elles sont ainsi bousculées par une forme de perte de repères autour des notions d’injures, de violence verbale et qui modifient ou menacent les codes sociaux du bien vivre ensemble. Sous des formes variées, plus ou moins accessibles au regard de l'adulte, l’insulte concerne tous les moments d’une scolarité et tous les types d’établissements. L’usage de l’insulte est de fait relativement routinier et banalisé dans l’entre soi adolescent. En effet, l’usage fréquent d'un juron le vide en partie de son contenu. Cela fait longtemps que l'expression « ta race !» ou le juron « putain! » (ou « fuck ») sont devenus de simples formules rituelles.
A cela s’ajoute l’aspect ludique de l’usage de l’insulte, qui suppose une connivence (entre copines, "sale arabe "peut être affectueux »), voire une admiration (« t'a vu comment il joue au foot, ce fils de pute !»).
L'insulte n'est pas toujours aussi violente que le pensent les adultes (enseignants, parents). Banalisée, elle perd de sa charge offensive et ne choque plus que ceux à qui elle n'est pas destinée. A l’intérieur du groupe de référence, ces mêmes termes perdent leur caractère péjoratif et seront catégorisés comme affectueux ou amicaux. Il faudrait accepter le décalage générationnel et savoir s’adapter à ce qu’est le public qu’on accompagne et non à ce qu’on voudrait qu’il soit.
Dans la situation présentée ici, on perçoit bien ce que l’on pourrait qualifier d’incompréhension totale entre les « adultes « et les « jeunes », incompréhension que l’on peut mettre en lien avec la définition du mot injure :
L’enjeu dans un travail avec les jeunes sur la notion d’insulte est donc essentiellement la prise de conscience du caractère offensant du terme employé, de ce qui porte atteinte à l’intégrité de la personne et de ce que cela peut avoir pour conséquences.
Il est également intéressant d’évoquer la possibilité de s’exprimer en public (et l’établissement scolaire est bien un lieu public) ou en privé. Sont considérés comme publics, des propos que leur auteur a clairement voulu diffuser largement : en classe, dans les médias, au cours d’une réunion publique, sur internet ou sur une affiche... Dans le cas contraire, on dit qu’ils ont été tenus dans un cadre privé, chez soi, dans un bureau fermé, lors d’un échange entre élèves dans un couloir (entendu « par hasard » par un enseignant), dans un mail, au sein d’un groupe restreint sur un outil de messagerie. Dans le cadre de la loi, les propos publics sont des délits, les propos non publics relèvent de la contravention.
L’enquête nationale Climat scolaire et victimation menée par le MASA en 2022 sur un panel d’établissements représentatif de l’ensemble du territoire, a mis en évidence les éléments suivants :
La banalisation de l’utilisation de mots ou expressions racistes, sexistes, homophobes, de la moquerie, doit susciter la vigilance en lien avec les phénomènes de harcèlement. Que ce soit dans les inter-relations au quotidien ou sur les réseaux sociaux, l’insulte est un des outils les plus efficaces dans la dévalorisation et la perte d’estime de soi de la victime de harcèlement. Aujourd’hui dans nos établissements nous ne pouvons pas ne pas voir ou entendre les signaux indicateurs des dynamiques de harcèlement entre élèves, et à ce titre, tout propos injurieux, dégradant ou humiliant doit être relevé et pris en compte.
Ce travail sur les insultes peut s’inscrire pleinement dans toutes les dimensions de l’éducation au vivre ensemble et de la lutte contre toute forme de discrimination, de la lutte contre les phénomènes de bouc émissaire et de harcèlement. Les aspects législatifs, présentés ci-après, peuvent être des leviers particulièrement intéressants à actionner. On pourra faire également des parallèles avec les règles mises en œuvre dans le sport par exemple …
Plus largement, cette question autour de l’expression « inappropriée » des jeunes s’inscrit dans un travail des compétences psycho sociales autour des notions d’empathie, de gestion des émotions, qui permet à chaque individu de s’inscrire dans une communication authentique et respectueuse. Des ateliers visant à travailler l’empathie, sur la communication non violente, ou la mise en œuvre du programme PRODAS sont autant de possibilité pour un travail de fond sur le climat scolaire de l’établissement
Définition de l’injure :
L’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse dispose :« Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait est une injure».
Expression outrageante, terme de mépris ou invective. Les tribunaux retiennent bien sûr les termes grossiers ou désobligeants mais pas seulement, en examinant le contexte, le ton, les circonstances ou l'évolution des mœurs. L'injure vise une personne ou un groupe de personnes déterminées.
L’injure se distingue de la diffamation, qui suppose l’allégation ou l’imputation d’un fait précis portant atteinte à l’honneur ou à la considération.
Elle se distingue également de l’outrage, réprimé à l’article 433-5 du code pénal, qui dispose : « Constituent un outrage puni de 7 500 euros d’amende les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l’envoi d’objets quelconques adressés à une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie ».
Le ministère public ne peut agir qu’en présence d’une plainte de la victime, sauf pour les injures raciales et l’injure envers un témoin. Il n’est lié que sur les faits et dispose de l’opportunité des poursuites.
Le désistement de la victime éteint l’exercice de l’action publique.
Peines encourues :
- Lorsqu’elle est commise envers un particulier, l’injure publique est punie d’une amende de 12 000 euros. En outre, le tribunal peut, comme pour toutes les infractions de presse, ordonner la saisie et la suppression ou la destruction de tout ou partie des exemplaires mis en vente, distribués ou exposés au regard du public ;
- Lorsqu’elle est commise envers une institution de l’Etat ou envers un « serviteur » de l’Etat, l’injure publique est également punie d’une amende de 12 000 euros. La récidive ne s’applique pas. La peine complémentaire de saisie, suppression ou destruction des exemplaires contenant des propos injurieux mis en vente, distribués ou exposés au regard du public peut être prononcée ;
-Lorsque l’injure publique présente un caractère discriminatoire, c’est-à-dire lorsqu’elle est commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou religion déterminée, la peine est aggravée puisqu’elle est fixée à un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende (depuis la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté).
- L’article 33 punit également d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende « l’injure commise dans les mêmes conditions envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap » ;
-L’article 34 dispose : « Les articles 31, 32 et 33 ne seront applicables aux diffamations ou injures dirigées contre la mémoire des morts que dans les cas où les auteurs de ces diffamations ou injures auraient eu l’intention de porter atteinte à l’honneur ou à la considération des héritiers, époux ou légataires universels vivants ».
- Depuis septembre 2002, l'outrage à une personne chargée d'une mission de service public - notamment les enseignants - peut coûter cher: jusqu'à six mois de prison et 7 500 euros d'amende. D'après le Code pénal, ce délit recouvre les « paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images, et l'envoi d'objets de nature à porter atteinte à la dignité de la personne visée et au respect dû à sa fonction ». L'insulte entre donc bien dans cette catégorie.
En revanche, si l’injure est publiée dans un cadre privé, auprès d’un cercle ne restreint de personne non visible par tout le monde, il s’agit d’une injure non-publique, constitutive d’une contravention.
L’injure constitue une attaque personnelle et directe. Lorsqu’elle est dirigée contre une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance religieuse, elle est réprimée. En revanche, ni la critique d’une religion ni le "blasphème" (outrage à la divinité) ne constituent des injures. En effet, en France, société laïque et pluraliste, le respect de toutes les croyances va de pair avec la liberté de critiquer les religions quelles qu’elles soient et avec celle de représenter des sujets ou objets de vénération religieuse.
Lorsque l'injure n'est pas publique, la peine encourue est une amende de 750 euros maximum (contravention de 4e classe) (art. R.624-4 du code pénal). Lorsqu’elle est publique, son auteur encourt jusqu'à 6 mois d’emprisonnement et 22 500 euros d'amende (art. 29 alinéa 2 et 33 alinéa 3 de la loi du 29 juillet 1881).
C’est l’infraction raciste la plus communément poursuivie devant les tribunaux. Il y a "provocation" lorsque des propos encouragent la discrimination, la haine ou la violence raciste à l’égard d’une personne ou d’un groupe "à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée".
Lorsqu'elle n’est pas publique, elle est punie de 1 500 euros d’amende maximum (art. R.625-7 du code pénal). Lorsqu’elle est publique, son auteur encourt jusqu’à un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende, ainsi que des peines complémentaires telles que l’affichage ou la diffusion de la condamnation (art. 24 al. 6 et 8 de la loi du 29 juillet 1881).
La définition de cette infraction est cependant très restrictive. Elle ne concerne en effet que les "crimes contre l'humanité tels qu'ils sont définis par l'article 6 du statut du tribunal militaire international annexé à l'accord de Londres du 8 août 1945 et qui ont été commis soit par les membres d'une organisation déclarée criminelle en application de l'article 9 dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction française ou internationale" - soit en pratique les crimes jugés par les tribunaux de Nuremberg et de Tokyo à l’issue de la Seconde Guerre mondiale.
L’auteur d’une telle contestation, nécessairement publique, encourt un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Le délit de provocation publique à la haine raciale institué par l'article 1er de la loi Pleven de 1972 a été inséré à l'article 24 alinéa 5 de la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881.
A cela s’ajoute l’aspect ludique de l’usage de l’insulte, qui suppose une connivence (entre copines, "sale arabe "peut être affectueux »), voire une admiration (« t'a vu comment il joue au foot, ce fils de pute !»).
L'insulte n'est pas toujours aussi violente que le pensent les adultes (enseignants, parents). Banalisée, elle perd de sa charge offensive et ne choque plus que ceux à qui elle n'est pas destinée. A l’intérieur du groupe de référence, ces mêmes termes perdent leur caractère péjoratif et seront catégorisés comme affectueux ou amicaux. Il faudrait accepter le décalage générationnel et savoir s’adapter à ce qu’est le public qu’on accompagne et non à ce qu’on voudrait qu’il soit.
Dans la situation présentée ici, on perçoit bien ce que l’on pourrait qualifier d’incompréhension totale entre les « adultes « et les « jeunes », incompréhension que l’on peut mettre en lien avec la définition du mot injure :
- « Une injure est une parole, un écrit, une expression quelconque de la pensée adressée à une personne dans l'intention de la blesser ou de l'offenser. ». C’est en effet sur la notion d’intention de blesser, et donc en l’occurrence sur l’absence de cette intention, que reposent les justifications des élèves pour expliquer que l’utilisation de mots injurieux ne prête absolument pas à conséquences.
L’enjeu dans un travail avec les jeunes sur la notion d’insulte est donc essentiellement la prise de conscience du caractère offensant du terme employé, de ce qui porte atteinte à l’intégrité de la personne et de ce que cela peut avoir pour conséquences.
Il est également intéressant d’évoquer la possibilité de s’exprimer en public (et l’établissement scolaire est bien un lieu public) ou en privé. Sont considérés comme publics, des propos que leur auteur a clairement voulu diffuser largement : en classe, dans les médias, au cours d’une réunion publique, sur internet ou sur une affiche... Dans le cas contraire, on dit qu’ils ont été tenus dans un cadre privé, chez soi, dans un bureau fermé, lors d’un échange entre élèves dans un couloir (entendu « par hasard » par un enseignant), dans un mail, au sein d’un groupe restreint sur un outil de messagerie. Dans le cadre de la loi, les propos publics sont des délits, les propos non publics relèvent de la contravention.
Violences verbales et harcèlement
Peu importe que l’insulte se fonde ou non sur une réalité, elle rappelle que chacune et chacun peut être réduit à son sexe, à sa sexualité, à sa catégorie sociale, à son origine migratoire, à son intelligence, réels ou supposés. Les insultes fonctionnent comme des catégories de classement qui manifestent possiblement, dans les classes, des rapports de pouvoir.L’enquête nationale Climat scolaire et victimation menée par le MASA en 2022 sur un panel d’établissements représentatif de l’ensemble du territoire, a mis en évidence les éléments suivants :
- 2 apprenants sur 10 parmi les jeunes interrogés ont déclaré avoir reçu un surnom désagréable ou blessant (les filles plus souvent que les garçons) depuis le début de l’année scolaire
- Près de 3 apprenants sur 10 déclarent avoir été insultés au moins une fois (les filles plus souvent que les garçons (30 % pour 26,8 %). Parmi les facteurs de discriminations affichés, les insultes liées à l’apparence physique et à la tenue vestimentaire dominent (citées par 11,3 % des apprenants, plus souvent les filles). Les insultes sexistes sont ensuite nommées par 9% des apprenants (davantage les filles que les garçons), les insultes anti-LGBT par 5,7 % et celles racistes par 5,2 %
La banalisation de l’utilisation de mots ou expressions racistes, sexistes, homophobes, de la moquerie, doit susciter la vigilance en lien avec les phénomènes de harcèlement. Que ce soit dans les inter-relations au quotidien ou sur les réseaux sociaux, l’insulte est un des outils les plus efficaces dans la dévalorisation et la perte d’estime de soi de la victime de harcèlement. Aujourd’hui dans nos établissements nous ne pouvons pas ne pas voir ou entendre les signaux indicateurs des dynamiques de harcèlement entre élèves, et à ce titre, tout propos injurieux, dégradant ou humiliant doit être relevé et pris en compte.
Les insultes racistes
Selon l’enquête nationale de climat scolaire et de victimation menée en 2017-2018 à l’Education Nationale, 7% des lycéens ont subi des insultes liées à leur origine ou à la couleur de leur peau, 3% à la religion. Ces insultes touchent davantage les lycées professionnels. La plupart de ces insultes sont le fait d’élèves à l’intérieur de l’établissement.Comment agir ?
- Que l’on souhaite reprendre un élève, un groupe d’élèves ou travailler avec toute une classe, il est important d’aborder la question du sens des mots employés, afin de responsabiliser celui,ou celle qui les utilise, quant à leur portée injurieuse. Face la banalisation des termes injurieux et à la minimisation de l’intention de blesser les personnes à qui ils sont destinés, un travail à la fois sur la sémantique et sur la loi aura pour objectif d’être clair sur ce dont on parle et de poser un cadre commun. Il s’agira alors de travailler sur la définition et la compréhension de l’insulte et de ses conséquences.
Ce travail sur les insultes peut s’inscrire pleinement dans toutes les dimensions de l’éducation au vivre ensemble et de la lutte contre toute forme de discrimination, de la lutte contre les phénomènes de bouc émissaire et de harcèlement. Les aspects législatifs, présentés ci-après, peuvent être des leviers particulièrement intéressants à actionner. On pourra faire également des parallèles avec les règles mises en œuvre dans le sport par exemple …
Plus largement, cette question autour de l’expression « inappropriée » des jeunes s’inscrit dans un travail des compétences psycho sociales autour des notions d’empathie, de gestion des émotions, qui permet à chaque individu de s’inscrire dans une communication authentique et respectueuse. Des ateliers visant à travailler l’empathie, sur la communication non violente, ou la mise en œuvre du programme PRODAS sont autant de possibilité pour un travail de fond sur le climat scolaire de l’établissement
Un outil spécifique pour aborder la notion d’injure et de violence verbale : LE MUR DES INSULTES
Le « mur des insultes » est un support qui a été développé par l’association nationale Contact, en collaboration avec le psychologue Éric Verdier, et qui est aujourd’hui utilisé par beaucoup d’autres acteurs, avec quelques variantes de méthode. Pour l’intervenant, il s’agit d’abord de faire écrire ou dire oralement aux jeunes des insultes puis de les inscrire sur un tableau en essayant de les définir avec eux. Les différentes insultes exprimées sont alors regroupées en plusieurs catégories en fonction des critères qu’elles visent (origine, sexe, orientation sexuelle, poids…). L’objectif ultime est de montrer la proximité forte qui existe entre les différents types de discrimination en proposant une réflexion sur le poids des mots, leur violence implicite et leur portée normative. Un travail sur l’étymologie des insultes emmène à s’interroger sur leur portée et permet une réelle prise de conscience sur leur impact sur autrui.Ce que dit la Loi
Définition de l’injure :
L’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse dispose :« Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait est une injure».
Expression outrageante, terme de mépris ou invective. Les tribunaux retiennent bien sûr les termes grossiers ou désobligeants mais pas seulement, en examinant le contexte, le ton, les circonstances ou l'évolution des mœurs. L'injure vise une personne ou un groupe de personnes déterminées.
L’injure se distingue de la diffamation, qui suppose l’allégation ou l’imputation d’un fait précis portant atteinte à l’honneur ou à la considération.
Elle se distingue également de l’outrage, réprimé à l’article 433-5 du code pénal, qui dispose : « Constituent un outrage puni de 7 500 euros d’amende les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l’envoi d’objets quelconques adressés à une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie ».
- L’injure peut être publique ou non-publique :
- Elle est publique lorsque les destinataires constituent un public indéterminé. Tel est le cas d’une injure pouvant être entendue ou lue par le public dans la rue, sur Internet ou encore sur un réseau social. L'injure publique suppose que soit utilisé l'un des moyens énoncés par l'article 23 de la loi de 1881 (discours, cris ou menaces proférés; écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l'écrit, de la parole ou de l'image; placards ou affiches; moyen de communication par voie électronique) Dans ce cas, il s’agit d’un délit puni d’une peine d’amende, peine pouvant être aggravée dans certains cas.
- Elle est non-publique lorsque les destinataires sont liés entre eux par une communauté d’intérêts. Tel est le cas d’une injure adressée directement à la victime, par exemple par SMS, ou d’une injure prononcée devant une cercle ne restreint de personnes partageant les mêmes intérêts, que la victime soit présente ou absente (assemblée générale d’actionnaire, membres d’une association ou syndicat, salariés d’une entreprise ...). L’injure non-publique est une contravention punie d’une peine d’amende.
Le ministère public ne peut agir qu’en présence d’une plainte de la victime, sauf pour les injures raciales et l’injure envers un témoin. Il n’est lié que sur les faits et dispose de l’opportunité des poursuites.
Le désistement de la victime éteint l’exercice de l’action publique.
Peines encourues :
- Lorsqu’elle est commise envers un particulier, l’injure publique est punie d’une amende de 12 000 euros. En outre, le tribunal peut, comme pour toutes les infractions de presse, ordonner la saisie et la suppression ou la destruction de tout ou partie des exemplaires mis en vente, distribués ou exposés au regard du public ;
- Lorsqu’elle est commise envers une institution de l’Etat ou envers un « serviteur » de l’Etat, l’injure publique est également punie d’une amende de 12 000 euros. La récidive ne s’applique pas. La peine complémentaire de saisie, suppression ou destruction des exemplaires contenant des propos injurieux mis en vente, distribués ou exposés au regard du public peut être prononcée ;
-Lorsque l’injure publique présente un caractère discriminatoire, c’est-à-dire lorsqu’elle est commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou religion déterminée, la peine est aggravée puisqu’elle est fixée à un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende (depuis la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté).
- L’article 33 punit également d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende « l’injure commise dans les mêmes conditions envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap » ;
-L’article 34 dispose : « Les articles 31, 32 et 33 ne seront applicables aux diffamations ou injures dirigées contre la mémoire des morts que dans les cas où les auteurs de ces diffamations ou injures auraient eu l’intention de porter atteinte à l’honneur ou à la considération des héritiers, époux ou légataires universels vivants ».
- Depuis septembre 2002, l'outrage à une personne chargée d'une mission de service public - notamment les enseignants - peut coûter cher: jusqu'à six mois de prison et 7 500 euros d'amende. D'après le Code pénal, ce délit recouvre les « paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images, et l'envoi d'objets de nature à porter atteinte à la dignité de la personne visée et au respect dû à sa fonction ». L'insulte entre donc bien dans cette catégorie.
- Cas particulier de l’injure sur Internet : Les détenteurs de profils sur les réseaux sociaux sont en mesure de restreindre ou non leur mur de diffusion.
En revanche, si l’injure est publiée dans un cadre privé, auprès d’un cercle ne restreint de personne non visible par tout le monde, il s’agit d’une injure non-publique, constitutive d’une contravention.
- L'injure raciste
L’injure constitue une attaque personnelle et directe. Lorsqu’elle est dirigée contre une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance religieuse, elle est réprimée. En revanche, ni la critique d’une religion ni le "blasphème" (outrage à la divinité) ne constituent des injures. En effet, en France, société laïque et pluraliste, le respect de toutes les croyances va de pair avec la liberté de critiquer les religions quelles qu’elles soient et avec celle de représenter des sujets ou objets de vénération religieuse.
Lorsque l'injure n'est pas publique, la peine encourue est une amende de 750 euros maximum (contravention de 4e classe) (art. R.624-4 du code pénal). Lorsqu’elle est publique, son auteur encourt jusqu'à 6 mois d’emprisonnement et 22 500 euros d'amende (art. 29 alinéa 2 et 33 alinéa 3 de la loi du 29 juillet 1881).
- La diffamation raciste
- La provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence raciste
C’est l’infraction raciste la plus communément poursuivie devant les tribunaux. Il y a "provocation" lorsque des propos encouragent la discrimination, la haine ou la violence raciste à l’égard d’une personne ou d’un groupe "à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée".
Lorsqu'elle n’est pas publique, elle est punie de 1 500 euros d’amende maximum (art. R.625-7 du code pénal). Lorsqu’elle est publique, son auteur encourt jusqu’à un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende, ainsi que des peines complémentaires telles que l’affichage ou la diffusion de la condamnation (art. 24 al. 6 et 8 de la loi du 29 juillet 1881).
- Le délit d'apologie des crimes
- La contestation de l'existence d'un ou plusieurs crimes contre l'humanité
La définition de cette infraction est cependant très restrictive. Elle ne concerne en effet que les "crimes contre l'humanité tels qu'ils sont définis par l'article 6 du statut du tribunal militaire international annexé à l'accord de Londres du 8 août 1945 et qui ont été commis soit par les membres d'une organisation déclarée criminelle en application de l'article 9 dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction française ou internationale" - soit en pratique les crimes jugés par les tribunaux de Nuremberg et de Tokyo à l’issue de la Seconde Guerre mondiale.
L’auteur d’une telle contestation, nécessairement publique, encourt un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Le délit de provocation publique à la haine raciale institué par l'article 1er de la loi Pleven de 1972 a été inséré à l'article 24 alinéa 5 de la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881.
Ressources
-Le mur des insultes
-Les mots qui font mal , activité pédagogique sur les formes d’étiquetage et d’insulte en milieu scolaire
-Les mots qui font mal , activité pédagogique sur les formes d’étiquetage et d’insulte en milieu scolaire
Bibliographie
- Insultes en tous genres : construction identitaire et socialisation des adolescents à l'école Jean-Pierre Durif-Varembont, Rebecca Weber ,Dans Nouvelle revue de psychosociologie 2014/1 (n° 17), pages 151 à 165
https://www.cairn.info/revue-nouvelle-revue-de-psychosociologie-2014-1-page-151.htm
-article de Séverine Depoilly dans The Conversation du 22/11/2020 : Ce que révèlent les insultes entre élèves
https://theconversation.com/ce-que-revelent-les-insultes-entre-eleves-149321
- Violences en milieu scolaire et banalisation du langage.L'ouverture des médiations de la parole.Jean-Pierre Durif-Varembont, Patricia Mercader, Christiane Durif-Varembont
Dans Adolescence 2013/1 (T. 31 n°1), pages 95 à 106 Éditions Éditions GREUPP
- Apprendre à vivre ensemble en classe, des jeux pour éduquer à l'empathie ,Zanna, O.,Dunod,(2015).
-L'éducation émotionnelle pour prévenir la violence. Pour une pédagogie de l'empathie,Zanna O.,Dunod (2019).
https://www.cairn.info/revue-nouvelle-revue-de-psychosociologie-2014-1-page-151.htm
-article de Séverine Depoilly dans The Conversation du 22/11/2020 : Ce que révèlent les insultes entre élèves
https://theconversation.com/ce-que-revelent-les-insultes-entre-eleves-149321
- Violences en milieu scolaire et banalisation du langage.L'ouverture des médiations de la parole.Jean-Pierre Durif-Varembont, Patricia Mercader, Christiane Durif-Varembont
Dans Adolescence 2013/1 (T. 31 n°1), pages 95 à 106 Éditions Éditions GREUPP
- Apprendre à vivre ensemble en classe, des jeux pour éduquer à l'empathie ,Zanna, O.,Dunod,(2015).
-L'éducation émotionnelle pour prévenir la violence. Pour une pédagogie de l'empathie,Zanna O.,Dunod (2019).
FAQ
-Que répondre à un élève, à qui on reproche l’utilisation de termes injurieux, qui se sent injustement mis en cause et qui invoque la liberté d’expression ?
La liberté d'expression, rappels :
C’est un droit constitutionnel reconnu à tout citoyen français. Parmi les pays occidentaux, le droit français est l'un des systèmes juridiques qui prévoit davantage d'exceptions à la liberté d'expression.
Dans son article 10, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen pose que : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. » Dans l'article 11, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen pose aussi que : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »
Toutefois, il existe des limites à la liberté d’expression. Elle est encadrée par la loi française. Cet encadrement se fonde notamment sur l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui stipule que « la liberté consiste à pouvoir tout ce qui ne nuit pas à autrui ». Les limites à la liberté d’expression sont précisées par la loi du 29 juillet 1881. La diffamation ou l’injure sont ainsi passibles d’une condamnation. La provocation à la discrimination, la haine ou la violence envers des personnes « à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » (article 24 de la loi du 29 juillet 1881 modifiée) l’est également. La provocation à la haine ou à la violence « à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation ou identité sexuelle ou de leur handicap » est pareillement proscrite. Les personnes qui tiennent de tels propos sont passibles d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. De même, l’apologie des crimes contre l’humanité est réprimée depuis la loi Gayssot du 13 juillet 1990. Celle-ci qualifie en effet de délit la contestation de l’existence des crimes contre l’humanité, tels qu’ils ont été définis dans le statut de Nuremberg de 1945. Enfin, l’apologie du terrorisme est elle aussi durement punie : depuis la loi du 13 novembre 2014, une personne qui se livre à cette apologie du terrorisme risque jusqu’à sept ans d’emprisonnement et 100 000 € d’amende.
Par ailleurs, le droit à l’humour et à la satire est permis par la loi dans certaines limites. Le tribunal de grande instance de Paris a estimé, dans son jugement du 9 janvier 1992, que la liberté d’expression « autorise un auteur à forcer les traits et à altérer la personnalité de celui qu’elle représente » et qu’il existe un « droit à l’irrespect et à l’insolence. » L’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo a par exemple été relaxé en mars 2007 dans l’affaire des caricatures de Mahomet qu’il avait publiées en février 2006 (voir ce document et ce document). Le tribunal correctionnel de Paris a alors jugé que « le genre littéraire de la caricature, bien que délibérément provocant, participe (…) à la liberté d’expression » et que malgré le « caractère choquant, voire blessant pour la sensibilité des musulmans » des dessins parus dans Charlie Hebdo, ils « apparaissent exclusifs de toute volonté délibérée d’offenser directement et gratuitement l’ensemble des musulmans. »
Pour aller plus loin :
-Site LUMNI : https://enseignants.lumni.fr/fiche-media/00000001773/les-limites-a-la-liberte-d-expression.html
-PUBLIC SENAT : https://www.publicsenat.fr/actualites/institutions/la-liberte-d-expression-a-t-on-le-droit-de-tout-dire-185370
-Comment intervenir face à l’utilisation de surnoms que l’on peut considérer comme ridicules, voire blessants, qui ne sont pas « clairement » des insultes ?
D’après une enquête de l’Observatoire international de la Violence à l’Ecole (OIEVE/UNICEF, 2011, N=12326) 20,9% des élèves de primaire ont été victimes de moqueries souvent ou très souvent et 15,2% des élèves se sont vu attribuer un surnom méchant souvent ou très souvent. Sachant que le harcèlement est fait de micros violences (comme, par exemple, les insultes, les menaces et les surnoms) qui se répètent et qu’il est fait de manière suffisamment discrète pour que les adultes ne les voient pas, les adultes peuvent adopter une position ferme face à l’usage de « surnom » plus ou moins » amicaux ». Exiger qu’en classe ou à chaque fois qu’ils sont en leur présence, les élèves ne s’interpellent que par leur prénom est une demande simple et claire qui peut faire réfléchir sur la banalisation de la moquerie, et surtout participer à désamorcer des tentatives de harcèlement.
-Doit-on interdire de manière explicite l’usage d’insultes dans le règlement intérieur de l’établissement ?
Les règlements intérieurs des EPLEFPA rappellent généralement les droits et devoirs des apprenants, sous une formulation proche de la suivante :
"Le respect d’autrui et du cadre de vie
L’apprenant est tenu à un devoir de tolérance et de respect d’autrui dans sa personnalité et dans ses convictions ainsi qu’au devoir de n’user d’aucune violence, ni physique, ni morale, ni verbale, y compris par le biais d’internet et en particulier les réseaux sociaux. De même est-il tenu de ne pas dégrader les biens appartenant à l’établissement.
Les actes à caractère dégradant ou humiliant, commis à l’intérieur de l’établissement, sont passibles de poursuites pénales, en plus des poursuites disciplinaires.""
C’est dans ce cadre que s’inscrit donc l’interdiction de l’insulte, replacée dans le cadre des violences verbales et du non-respect d’autrui. Elle peut donc être éventuellement sanctionnée par toute mesure disciplinaire en lien avec le manquement aux règles de fonctionnement de l’établissement.
-Que faire lorsqu’un adulte de la communauté éducative est insulté ?
L’insulte privée à l’encontre d’un enseignant
A priori, la loi punit d’une contravention de 38 euros l’insulte proférée dans un cadre privé. Pour protéger les personnels d’éducation, néanmoins, l’article L134-5 du Code général de la fonction publique prévoit un délit spécial : l’outrage à agent. La sanction de l’outrage à agent est renforcée.
L’outrage à agent est « un acte qui nuit à la dignité ou au respect dû à la fonction d’un agent public », commis pendant l’exercice de sa mission. Au sens de la loi, l’enseignant est un agent chargé d’une mission de service public. À ce titre, l’auteur d’une insulte proférée à l’adresse d’un enseignant, en privé, risque 6 mois de prison et 7 500 euros d’amende.
Exemple d’insulte privée : une lettre ou un SMS d’insultes.
-Les insultes commises en public
Sont par exemple considérées comme des insultes publiques :
Dans le cas particulier des insultes à caractère raciste, sexiste, homophobe ou handiphobe : la sanction est portée à 1 an de prison et 45 000 euros d’amende.
-L’échelle de gravité des menaces :
Selon la jurisprudence, constitue une menace « l’acte d’intimidation qui inspire la crainte d’un mal ». Il peut s’agir d’un dessin, d’une parole, d’un propos écrit ou encore d’un geste. Le Code pénal distingue 4 catégories de menaces, selon leur niveau de gravité :
Site de l’Autonome de Solidarité : https://www.autonome-solidarite.fr/articles/personnel-deducation-victime-dinsultes-ou-de-menaces-comment-reagir/
La liberté d'expression, rappels :
C’est un droit constitutionnel reconnu à tout citoyen français. Parmi les pays occidentaux, le droit français est l'un des systèmes juridiques qui prévoit davantage d'exceptions à la liberté d'expression.
Dans son article 10, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen pose que : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. » Dans l'article 11, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen pose aussi que : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »
Toutefois, il existe des limites à la liberté d’expression. Elle est encadrée par la loi française. Cet encadrement se fonde notamment sur l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui stipule que « la liberté consiste à pouvoir tout ce qui ne nuit pas à autrui ». Les limites à la liberté d’expression sont précisées par la loi du 29 juillet 1881. La diffamation ou l’injure sont ainsi passibles d’une condamnation. La provocation à la discrimination, la haine ou la violence envers des personnes « à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » (article 24 de la loi du 29 juillet 1881 modifiée) l’est également. La provocation à la haine ou à la violence « à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation ou identité sexuelle ou de leur handicap » est pareillement proscrite. Les personnes qui tiennent de tels propos sont passibles d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. De même, l’apologie des crimes contre l’humanité est réprimée depuis la loi Gayssot du 13 juillet 1990. Celle-ci qualifie en effet de délit la contestation de l’existence des crimes contre l’humanité, tels qu’ils ont été définis dans le statut de Nuremberg de 1945. Enfin, l’apologie du terrorisme est elle aussi durement punie : depuis la loi du 13 novembre 2014, une personne qui se livre à cette apologie du terrorisme risque jusqu’à sept ans d’emprisonnement et 100 000 € d’amende.
Par ailleurs, le droit à l’humour et à la satire est permis par la loi dans certaines limites. Le tribunal de grande instance de Paris a estimé, dans son jugement du 9 janvier 1992, que la liberté d’expression « autorise un auteur à forcer les traits et à altérer la personnalité de celui qu’elle représente » et qu’il existe un « droit à l’irrespect et à l’insolence. » L’hebdomadaire satirique Charlie Hebdo a par exemple été relaxé en mars 2007 dans l’affaire des caricatures de Mahomet qu’il avait publiées en février 2006 (voir ce document et ce document). Le tribunal correctionnel de Paris a alors jugé que « le genre littéraire de la caricature, bien que délibérément provocant, participe (…) à la liberté d’expression » et que malgré le « caractère choquant, voire blessant pour la sensibilité des musulmans » des dessins parus dans Charlie Hebdo, ils « apparaissent exclusifs de toute volonté délibérée d’offenser directement et gratuitement l’ensemble des musulmans. »
Pour aller plus loin :
-Site LUMNI : https://enseignants.lumni.fr/fiche-media/00000001773/les-limites-a-la-liberte-d-expression.html
-PUBLIC SENAT : https://www.publicsenat.fr/actualites/institutions/la-liberte-d-expression-a-t-on-le-droit-de-tout-dire-185370
-Comment intervenir face à l’utilisation de surnoms que l’on peut considérer comme ridicules, voire blessants, qui ne sont pas « clairement » des insultes ?
D’après une enquête de l’Observatoire international de la Violence à l’Ecole (OIEVE/UNICEF, 2011, N=12326) 20,9% des élèves de primaire ont été victimes de moqueries souvent ou très souvent et 15,2% des élèves se sont vu attribuer un surnom méchant souvent ou très souvent. Sachant que le harcèlement est fait de micros violences (comme, par exemple, les insultes, les menaces et les surnoms) qui se répètent et qu’il est fait de manière suffisamment discrète pour que les adultes ne les voient pas, les adultes peuvent adopter une position ferme face à l’usage de « surnom » plus ou moins » amicaux ». Exiger qu’en classe ou à chaque fois qu’ils sont en leur présence, les élèves ne s’interpellent que par leur prénom est une demande simple et claire qui peut faire réfléchir sur la banalisation de la moquerie, et surtout participer à désamorcer des tentatives de harcèlement.
-Doit-on interdire de manière explicite l’usage d’insultes dans le règlement intérieur de l’établissement ?
Les règlements intérieurs des EPLEFPA rappellent généralement les droits et devoirs des apprenants, sous une formulation proche de la suivante :
"Le respect d’autrui et du cadre de vie
L’apprenant est tenu à un devoir de tolérance et de respect d’autrui dans sa personnalité et dans ses convictions ainsi qu’au devoir de n’user d’aucune violence, ni physique, ni morale, ni verbale, y compris par le biais d’internet et en particulier les réseaux sociaux. De même est-il tenu de ne pas dégrader les biens appartenant à l’établissement.
Les actes à caractère dégradant ou humiliant, commis à l’intérieur de l’établissement, sont passibles de poursuites pénales, en plus des poursuites disciplinaires.""
C’est dans ce cadre que s’inscrit donc l’interdiction de l’insulte, replacée dans le cadre des violences verbales et du non-respect d’autrui. Elle peut donc être éventuellement sanctionnée par toute mesure disciplinaire en lien avec le manquement aux règles de fonctionnement de l’établissement.
-Que faire lorsqu’un adulte de la communauté éducative est insulté ?
L’insulte privée à l’encontre d’un enseignant
A priori, la loi punit d’une contravention de 38 euros l’insulte proférée dans un cadre privé. Pour protéger les personnels d’éducation, néanmoins, l’article L134-5 du Code général de la fonction publique prévoit un délit spécial : l’outrage à agent. La sanction de l’outrage à agent est renforcée.
L’outrage à agent est « un acte qui nuit à la dignité ou au respect dû à la fonction d’un agent public », commis pendant l’exercice de sa mission. Au sens de la loi, l’enseignant est un agent chargé d’une mission de service public. À ce titre, l’auteur d’une insulte proférée à l’adresse d’un enseignant, en privé, risque 6 mois de prison et 7 500 euros d’amende.
Exemple d’insulte privée : une lettre ou un SMS d’insultes.
-Les insultes commises en public
Sont par exemple considérées comme des insultes publiques :
- Les insultes proférées par un élève à l’intérieur de l’établissement, devant d’autres élèves.
- Les insultes proférées par un parent d’élève à l’entrée ou à la sortie de l’établissement.
- Les publications et les commentaires insultants sur les comptes publics de réseaux sociaux.
- Les insultes proférées lors d’une réunion de parents d’élèves.
Dans le cas particulier des insultes à caractère raciste, sexiste, homophobe ou handiphobe : la sanction est portée à 1 an de prison et 45 000 euros d’amende.
-L’échelle de gravité des menaces :
Selon la jurisprudence, constitue une menace « l’acte d’intimidation qui inspire la crainte d’un mal ». Il peut s’agir d’un dessin, d’une parole, d’un propos écrit ou encore d’un geste. Le Code pénal distingue 4 catégories de menaces, selon leur niveau de gravité :
- La menace « simple » de commettre un délit ou un crime à l’encontre d’une personne est sanctionnée d’une amende de 7 500 euros et d’une peine de 6 mois de prison.
- La menace de mort est plus lourdement sanctionnée : l’auteur risque 3 ans de prison et 45 000 euros d’amende.
- La menace avec ordre de remplir une condition est punie comme la menace de mort. Exemple : un parent d’élève dit au professeur qu’il « ne le lâchera pas » tant que son enfant aura de mauvaises notes ; si le professeur ne met pas de bonnes notes à l’élève, il risque d’être harcelé par le parent.
- La menace de mort avec ordre de remplir une condition est la plus lourdement sanctionnée : jusqu’à 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende.
Site de l’Autonome de Solidarité : https://www.autonome-solidarite.fr/articles/personnel-deducation-victime-dinsultes-ou-de-menaces-comment-reagir/
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